La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide se réjouit des décisions de punir Ngenzi et Barahira

La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide se réjouit des décisions judiciaires de certains Etats de punir les auteurs du génocide commis contre les Tutsi selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948

La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide [CNLG] se réjouit de la décision de certains Etats de réprimer le crime de génocide en vertu de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 09 décembre 1948 et en vertu du droit international coutumier selon Dr Bizimana Jean-Damascène Secrétaire Exécutif.

En effet, le 6/7/2018, la Cour d’Assises de Paris a confirmé en appel la peine de réclusion criminelle à perpétuité pour Tito Barahira et Octavien Ngenzi. Ces deux anciens bourgmestres ont planifié et exécuté un plan d’extermination des Tutsi à Kabarondo, dans l’ancienne préfecture de Kibungo. Plus de 2000 personnes, femmes, hommes, enfants, personnes âgées réfugiés dans la paroisse de Kabarondo et ses environs ont été sauvagement massacrées, puis découpés à la machette, en une journée.

Dans le même sens, la CNLG rappelle aussi la décision de la Cour d’Assises de Bobigny (France) qui a confirmé la peine de 25 ans d’emprisonnement pour Pascal Simbikangwa, après un procès qui s’est tenu entre le 25/10 et le 03/12/2016.

Par ailleurs, la CNLG prend acte de la condamnation par la justice suédoise de Rukeratabaro Théodore, qui l’a condamné à perpétuité le 27/06/2018, pour sa participation dans le génocide et d’autres crimes contre l’humanité dans l’ancienne commune de Cyimbogo [Cyangugu].

Des avocats de la défense dans ces procès allèguent à tort que des bourgmestres n’avaient aucun pouvoir et qu’ils ont été dépassés par l’ampleur des tueries. La CNLG voudrait rappeler que les bourgmestres détenaient un pouvoir exorbitant qu’ils ont largement utilisé durant le génocide perpétré contre les Tutsi. En effet, les bourgmestres agissaient comme les représentants du Président de la République dans la Commune.

Ils étaient chargés du maintien de l’ordre public dans leur commune et avaient l’autorité absolue sur la police communale, de même que sur les gendarmes mis à la disposition de la commune. Le bourgmestre exerçait en dernier ressort une autorité sur la police communale et assurait l’entière responsabilité de l’organisation, du fonctionnement et du contrôle de ce corps. [Loi du 23/11/1963 sur l’organisation communale]. Le rôle du bourgmestre a été longuement mis en exergue dans le jugement de condamnation de Jean-Paul Akayesu, ancien bourgmestre de Taba, reconnu coupable de génocide et condamné à perpétuité par le TPIR le 2/9/1998 [ICTR, Le Procureur contre Jean-Paul Akayesu, Affaire No ICTR-96-4-5, par. 61-62].

C’est dans ce sens que les anciens bourgmestres Ngenzi et Barahira qui se sont succédés comme bourgmestres de la Commune de Kabarondo ont donné des instructions d’exterminer les Tutsi de leur commune et la population a exécuté leurs instructions.

Outre le jugement Ngenzi et Barahira, 22 autres jugements ont été rendus par les cours et tribunaux dans d’autres pays, comme la Suède, Belgique, Norvège, Canada, Allemagne, Finlande et les Pays Bas. En plus de ces jugements prononcés par des juridictions étrangères, dix-huit [18] personnes ont été extradés au Rwanda : les USA, le Canada, l’Uganda, les Pays-Bas, le TPIR, la Norvège et l’Allemagne.

Cependant, même si on peut reconnaitre dans un sens beaucoup de progrès dans le domaine des poursuites de suspects de génocide demeurant à l’étranger, dans l’autre, il faut déplorer certaines décisions judiciaires, constitutives d’un déni de justice.

Ainsi, la CNLG déplore et trouve très injuste la décision de la Cour d’appel de Paris du 21/6/2018 qui a confirmé le non-lieu pour l’abbé Wenceslas Munyeshyaka dont le rôle dans le génocide, crimes contre l’humanité, les viols et autres violences sexuelles a été confirmé par plusieurs témoignages concordants de victimes de la paroisse de Sainte Famille, du Centre national de pastorale Saint Paul et ses environs.
Il convient aussi de rappeler que plusieurs suspects fugitifs Rwandais [42] vivent sur le sol français sans être arrêtés ni jugés.

A titre d’illustration on peut citer certains cas :
Dr Sosthène MUNYEMANA, plainte déposée le 18/10/1995 ; Laurent BUCYIBARUTA , plainte déposée le 6/10/2000; Laurent SERUBUGA, plainte déposée le 6/10/2000; Agathe KANZIGA HABYARIMANA, plainte déposée le 3/2/2007; Eugène RWAMUCYO, plainte déposée le 15/4/2007; Marcel BIVUGABAGABO, plainte déposée le 2008; Pierre TEGERA, plainte déposée le 7/5/2009, plainte déposée en décembre 2016; Charles TWAGIRA, plainte déposée le 30/11/2009; Hyacinthe Rafiki NSENGIYUMVA, plainte déposée le 6/1/2012; Claude MUHAYIMANA, plainte déposée le 3/6/2013 ; Félicien BALIGIRA, plainte déposée le 22/5/2014, et bien d’autres.

Au vu de ces différentes affaires, il apparait clairement que la justice française a mis trop de temps à poursuivre les fugitifs se trouvant sur son sol, et a systémiquement refusé, pour des motifs politiques, de les extrader vers le Rwanda.

Par ailleurs, la CNLG insiste pour que les 914 mandats d’arrêts émis par la justice rwandaise soient pris en considération et exécutés par tous les Etats dans lesquels ces mandants ont été envoyés. Un plus grand nombre de suspects pour génocide se trouve en République Démocratique du Congo [254], en Uganda [226], en Europe, aux Etats Unis d’Amérique, en Australie et en Nouvelle Zélande.

La CNLG rappelle enfin que l’arrestation et le jugement des suspects du génocide perpétré contre les Tutsi constituent une obligation internationale pour tous les Etats en vertu du droit international conventionnel et du droit international coutumier.

Ntakirutimana Deus